jeudi 20 décembre 2012

Les tables en dialogue avec l’atelier

      Exposition Les Tables, à l'atelier Lebras (Nantes)du 15 au 30 novembre 2012    

       Installés depuis le 15 novembre dans cet ancien atelier d’Alain Lebras, six artistes qui se connaissaient à peine y ont été invités à l’initiative de l’un d’entre eux à faire une exposition. C’est en apprenant à se connaître, qu’ils s’aperçoivent que le questionnement sur la table leur est commun. Quoi de plus passionnant que de revisiter un objet aussi universel, usuel et commun qu’une table ? Dans des styles différents, ce thème et ce lieu de caractère, patiné par le temps et les multiples passages qu’il a connu, les réunissent donc dans une même exposition. Les jeunes plasticiens ont créé leur oeuvre chacun de leur coté, résultat de leur réflexion.
        A l’entrée le charme opère. L’oeuvre composée de lino installé au sol et de quatre tréteaux qui en surélève deux bandes se remarque à peine au premier coup d’oeil, comme si le sol avait toujours été là : tout semble normal ; l’énorme poêle à bois rouillé participant fortement à l’ambiance banale de cette pièce. Ce n’est qu’en observant plus attentivement qu’on remarque l’étrange de l’installation. (Schéma 1)
        Par un jeu de cache-cache, nous sommes immédiatement invités à avancer vers la deuxième oeuvre. En effet seulement quelques « branches » métalliques dépassent du mur du fond, d’un orange saturé. Bien qu’ayant peu d’affinités avec l’atmosphère du lieu, étant même en total contraste, son ingénieux placement nous fait l’apprécier. (Schéma 3) Les bords de la table n’ont pas été placés parallèlement aux murs, ce qui crée une dynamique, et nous donne envie d’en faire le tour. Placé en écho à l’autre bout de la pièce, une autre table, basse et plus simple, ne semble pas très intégrée au reste de l’exposition. La seule pertinence que j’y ai trouvée est ce décalage par rapport à un carré - sans doute déjà existant - au sol, comme une empreinte. Ces deux oeuvres, plus épurées que les autres, ont été placées dans la pièce la plus neuve de l’atelier, peinte en blanc. Tandis que les suivantes s’inspirent du caractère du lieu.
         Bien que l’exposition soit éparse, c’est par l’utilisation de matériaux bruts que les deux sculptures de la verrière s’unissent. Celle de gauche semble en lévitation, mais elle est en fait reliée par ses extrémités à des câbles en tension fixés dans le sol, lien physique entre l’oeuvre et l’atelier. A droite, les pics en bois de cette table évoquant les bonnes manières paraissent directement soulevés du vieux plancher de bois. Elle a été placée dans le sens de l’arrivée du spectateur, et sur un nouveau niveau, parallèlement aux murs, pour replacer la table dans son usage habituel, celui du repas.
Plus au fond, la seule table de petite taille et très raffinée est installée dans un ancien bassin de ciment, orné de vieux carreaux de faïence. Il s’agit encore une fois d’un habile choix car le raffinement des deux éléments entrent en résonnance.
         Enfin, plus en retrait dans une petite salle à laquelle on accède par quelques marches, se trouve la dernière table. Repeinte en gris sombre par l’artiste, cette table est mise en valeur par ce changement d’échelle par rapport à l’atelier. La focalisation était nécessaire car on doit s’approcher pour comprendre l’oeuvre, et aussi apprécier la minutie du travail de l’argenterie. L’effet est aussi renforcé par l’éclairage direct par le dessus ; qui est d’ailleurs repris pour chacune des tables.
Si je n’ai pas été sensible à toutes les oeuvres, leur mise en scène adroite me les fait appréhender dans leur totalité et en détail. Cette exposition est une preuve de plus que la
scénographie est un travail à part entière (elle a nécessité une semaine de travail) et que son rôle est primordial dans l’appréciation des oeuvres. Le plus remarquable pour ces jeunes artistes a été de provoquer une déambulation naturelle dans ce lieu en invoquant la curiosité du visiteur.